22
Dernières paroles

 

 

 

Bouleversé, j’escaladai les marches, récupérant au passage mon sac et la lanterne. Je pensais que Mab allait m’emboîter le pas, mais elle me fit signe de ne pas m’occuper d’elle :

— Je ne peux pas partir avec toi à cause de cette barrière invisible, Tom. J’emprunterai la porte que ta mère va ouvrir. À plus tard !

Je ne répondis rien, je n’étais plus maître de ma voix. Si j’essayais de parler, les sanglots que je retenais à grand-peine m’échapperaient de façon incontrôlable.

Je dévalai l’escalier en spirale et m’engageai dans le vaste espace obscur, en espérant marcher dans la bonne direction, pour retrouver la sortie.

Lorsque je l’atteignis, je distinguai avec soulagement les silhouettes d’Alice, d’Arkwright et de l’Épouvanteur de l’autre côté. Je franchis l’ouverture.

Alice me sauta au cou :

— Oh, Tom ! Tu en as mis, du temps ! On n’a pas trouvé d’autre entrée, alors on est revenus ici pour te guetter. On t’attend depuis une éternité ! J’ai cru que tu ne ressortirais jamais, qu’une chose terrible était arrivée.

Elle s’interrompit et me regarda au fond des yeux :

— Mais il est arrivé une chose terrible, n’est-ce pas ?

Les mots coincés dans ma gorge, j’opinai de la tête. Touchant du bout du doigt mes cheveux roussis et les cloques sur mon visage, elle gémit :

— Tom ! Tu es brûlé !

— Ce n’est rien, dis-je d’une voix rauque. Rien du tout, comparé à ce qui s’est passé…

— Raconte, petit, m’interrompit l’Épouvanteur avec une douceur inhabituelle. Dis-nous tout…

— C’est maman. Elle combat l’Ordinn. Elles mourront toutes les deux quand l’Ord s’effondrera. Il faut fuir le plus vite possible.

— On ne peut rien faire pour elle, Tom ? cria Alice. Rien qui puisse la sauver ?

Je secouai la tête, et de lourdes larmes tièdes roulèrent sur mes joues :

— Nous ne pouvons qu’exaucer son dernier vœu : nous mettre à l’abri avant la destruction de l’Ord.

Arkwright eut une grimace inquiète :

— Si nous restons là, nous serons entraînés dans les profondeurs de la Terre.

Il n’était plus temps de discuter. Nous nous lançâmes dans une course éperdue à travers les salles et les corridors obscurs, dévalant des volées d’escaliers pour rejoindre la cour pavée, tout en bas.

Nous avions trop chaud, et ce n’était pas seulement l’effort qui nous faisait transpirer. La température de l’air augmentait, la chaleur irradiait des murs. L’Ord allait s’envelopper de la colonne de feu qui l’entraînerait vers son territoire souterrain. Ses occupants retourneraient à leur sommeil avant d’avoir une chance de déferler sur le monde pour y perpétrer leurs ravages. Le globe rougeoyant d’un élémental tenta une approche ; l’Épouvanteur le repoussa d’un coup de bâton. Il s’éloigna dans un flottement incertain avant de s’éteindre.

Nous avions presque atteint la dernière galerie, celle qui menait à la cour intérieure. Nous étions presque tirés d’affaire ; presque… Un autre élémental se détacha du mur, au-dessus de nos têtes. Celui-là était gros, opaque, menaçant. Alors qu’il venait vers nous, deux autres le rejoignirent. Nous accélérâmes l’allure.

Un coup d’œil par-dessus mon épaule m’apprit qu’ils se rapprochaient, et qu’ils étaient six ou sept, à présent.

L’entrée du passage fut bientôt devant nous. C’est alors qu’Arkwright s’arrêta, tenant son bâton à deux mains.

— Passez devant ! lança-t-il. Je les retiens.

— Pas question, rétorqua mon maître. On va les affronter ensemble.

Arkwright prit son air buté.

— Pour qu’on se fasse tous tuer ? aboya-t-il. Emmenez le garçon ! C’est sa sécurité qui importe, et vous le savez !

L’Épouvanteur hésita.

— Filez tant qu’il n’est pas trop tard, insista Arkwright. Je vous rejoins dès que j’en ai fini avec ces saletés.

Mon maître me saisit alors par les épaules et me poussa dans le corridor. Je voulus résister, mais Alice m’avait attrapé un bras et m’entraînait déjà. Je jetai un regard en arrière. Arkwright nous tournait le dos, le bâton levé à l’oblique, en position de défense. Un globe incandescent fonça à l’attaque ; il le transperça de sa lame. Ce fut la dernière image que j’emportai de lui.

L’Épouvanteur, Alice et moi traversâmes la cour, parcourûmes le tunnel à toutes jambes avant de surgir de l’autre côté des murailles. Nous étions sortis de l’Ord. Nous reprîmes en hâte la route de Kalambaka, pataugeant dans la boue créée par le déluge. Nous n’étions pas les seuls survivants. Une petite troupe de sorcières des trois clans, comprenant Grimalkin, Mab et ses sœurs, courait devant nous. Nous les rattrapâmes, et mon maître lui-même parut soulagé de les trouver là.

Un rugissement, tel le cri de rage et de douleur d’un animal blessé, nous obligea à nous retourner. La nuée noire s’était reformée au-dessus de l’Ord. Des éclairs aveuglants s’en échappaient, qui illuminaient de leurs lueurs zigzagantes les flèches spiralées des trois tours.

La chaleur, dans notre dos, augmentait avec une rapidité inquiétante. Il fallait s’éloigner de là, et vite ! D’un instant à l’autre, la gigantesque artère de feu relierait le nuage au sol. Si nous en étions trop proches, elle nous entraînerait dans son tourbillon infernal.

Enfin, à bout de souffle, nous nous arrêtâmes pour regarder en arrière, alertés par les sifflements de la colonne flamboyante. On aurait dit les cris des banshees, ces créatures annonciatrices de mort. De nouveau, la colonne palpitait. L’Ord, à l’intérieur, était à présent invisible. Seul le sommet des tours luisait, chauffé à blanc. Je pensai à maman, restée dans la salle du dôme, tenant l’Ordinn entre ses griffes. Soudain, les tours vacillèrent : la citadelle se désintégrait. L’Ord était entraîné vers les profondeurs, et sa chute le détruisait. L’Ordinn était vaincue, elle ne reviendrait jamais dans notre monde. Mais maman allait mourir elle aussi dans ce brasier, et cette pensée me torturait.

Et puis il y avait Bill Arkwright. S’était-il débarrassé de ses adversaires à temps pour s’échapper ?

Le flamboiement commençait à s’éteindre, un vent violent se leva. L’air semblait puissamment aspiré vers l’endroit où l’Ord avait été englouti. Lorsque les bourrasques se calmèrent, une bruine froide se mit à tomber. Je fermai les yeux, et j’eus presque l’impression d’être de retour dans le Comté. Nous patientâmes un long moment, mais Arkwright ne réapparut pas. Il était mort, cela ne faisait aucun doute.

Nous marchâmes en silence en direction de Meteora. La pluie qui me mouillait le visage délayait mes larmes.

 

Nous contournâmes Kalambaka avant de nous diriger vers le plus grand des monastères. L’Épouvanteur voulait rendre visite au père supérieur et lui faire le récit des événements.

Je me souvenais que les femmes n’étaient pas admises dans l’enceinte du bâtiment, mais je ne fis aucune remarque. Alice monta l’escalier avec l’Épouvanteur et moi. À l’aide des herbes médicinales qu’elle transportait dans son sac de cuir, elle avait concocté un onguent et l’avait étalé sur mes brûlures. La douleur s’était apaisée aussitôt. C’était une recette employée par tous les guérisseurs du Comté, l’obscur n’y jouait aucun rôle. Néanmoins, l’Épouvanteur avait secoué la tête d’un air désapprobateur.

Je préparais mes arguments en prévision d’une contestation : Alice avait tenu un grand rôle dans notre combat, participant ainsi au sauvetage du monastère. Si on lui refusait l’accès, je ferais demi-tour moi aussi.

Mais nous entrâmes sans difficulté, et on nous conduisit aussitôt auprès du supérieur. Pour la deuxième fois, nous fûmes introduits dans la cellule austère où le prêtre au visage émacié était en prière. Nous attendîmes patiemment, et je me remémorai avec chagrin notre visite précédente, quand maman était encore en vie. Enfin il releva la tête :

— Bienvenue ! Je vous suis infiniment reconnaissant, car je devine que vous revenez victorieux, sinon, vous ne seriez pas ici.

— Maman a payé cette victoire de sa vie, dis-je.

Il me sembla que ma voix, blessée, amère, appartenait à quelqu’un d’autre.

Le prêtre m’adressa un sourire très doux :

— Si cela peut t’être une consolation, sache que ta mère a donné sa vie avec joie afin de libérer notre monde de cette créature maudite. Nous en avons parlé maintes fois dans le passé. Ne te l’a-t-elle jamais dit, Thomas ?

Je secouai la tête. Ce vieil homme en savait certainement plus sur maman que moi, et cette idée me faisait mal. Elle avait prévu sa mort et ne m’avait révélé cela qu’aux derniers instants. Mais j’avais une question à poser au supérieur, une question à laquelle il me fallait à tout prix une réponse :

— L’Ord a été détruit et définitivement renvoyé vers l’obscur. Est-ce là que maman se trouve, désormais ? Enfermée pour toujours dans le noir ?

Le prêtre resta silencieux un long moment, et je compris qu’il choisissait ses mots avec soin. Je commençai à craindre le pire.

— Je crois en l’infinie miséricorde de Dieu, Thomas, dit-il enfin. Sans elle, nous serions tous condamnés, car nous sommes tous des êtres imparfaits. Nous prierons pour ta mère, c’est tout ce que nous pouvons faire.

Je ravalai un sanglot. J’aurais voulu rester seul avec mon chagrin, mais je dus encore entendre le compte rendu détaillé que l’Épouvanteur donna de notre combat.

Après quoi, nous nous rendîmes au catholicon, où les chants des moines s’élevèrent à nouveau sous les hautes voûtes. Le père supérieur me dit qu’ils priaient pour ma mère et pour toutes les victimes de l’Ordinn. Je m’efforçai du fond du cœur de croire que maman avait rejoint la lumière.

Mais le doute me rongeait au souvenir des crimes qu’elle avait commis, des siècles auparavant. Devait-elle les expier, maintenant ? Elle avait tant travaillé pour se racheter ! L’idée qu’elle puisse endurer une éternité de ténèbres m’était insupportable. Le monde me paraissait un lieu terrible, cruel, injuste. D’autant que, bientôt, je devrais affronter le Malin. J’avais espéré que maman m’armerait contre lui. À présent, j’étais seul.

 

Mon maître et moi attendîmes le lendemain pour discuter en détail des derniers événements. Nous nous étions accordé une journée de repos avant de rejoindre la côte et de nous rembarquer pour le Comté. L’Épouvanteur m’entraîna à l’écart du campement, dans le but évident de nous éloigner d’Alice. Nous nous assîmes par terre, face à face.

Je lui rapportai comment maman avait repris sa forme première et immobilisé l’Ordinn pendant que l’Ord s’engouffrait dans les entrailles de la Terre. Je lui racontai presque tout, sans lui révéler cependant la véritable identité de ma mère ni mon pacte avec le Malin. Cela, je ne le lui confierais jamais ; c’était à moi seul d’affronter mon destin. Le Malin viendrait réclamer son dû la nuit suivante.

J’avais l’impression de dériver, d’être emporté loin de mon maître par un courant implacable. Il avait sacrifié beaucoup de ses principes en acceptant de venir en Grèce combattre l’Ordinn. Moi, c’était mon âme que j’avais offerte pour prix de notre victoire. Elle appartiendrait au Malin, et il ne me resterait plus aucun espoir de salut.

Quand j’eus achevé mon récit, l’Épouvanteur poussa un long soupir ; puis il tira deux lettres de la poche de son manteau :

— Elles sont de ta mère, petit. La première est pour moi, la deuxième, pour toi. Je les ai lues toutes les deux. C’est cette lecture qui m’a décidé à vous accompagner ici, au mépris de mes plus profondes convictions.

Il me les tendit, et je commençai par celle qui m’était adressée :

 

Cher Tom,

Si tu lis cette lettre, c’est que je ne suis plus. Ne me pleure pas trop longtemps. Rappelle-toi les moments de bonheur que nous avons partagés quand tes frères et toi étiez encore des enfants et que ton père était en vie. J’étais pleinement heureuse, alors, et aussi proche de la nature humaine qu’il m’était possible de l’être.

J’ai prévu ma mort il y a bien des années. J’aurais pu m’écarter de cette voie, mais je savais qu’en sacrifiant ma vie, j’offrirais une grande victoire à la lumière. Qu’importait le prix à payer ; l’Ordinn serait enfin vaincue.

À toi à présent de faire un pas de plus et de venir à bout du Malin. Ou du moins de le mettre hors d’état de nuire. Dans l’accomplissement de cette tâche, tu trouveras en Alice Deane une précieuse alliée. Quoi qu’il arrive, je serai toujours fière de toi. Tu as surpassé toutes mes espérances.

Avec tout mon amour,

Ta maman

 

Repliant lentement la lettre, je la rangeai dans ma poche. C’était la dernière chose qui me viendrait de ma mère, les derniers mots qu’elle m’adresserait. Je lus ensuite la missive adressée à mon maître, celle qui avait balayé ses ultimes réticences :

 

Cher monsieur Gregory,

Veuillez, me pardonner les tourments que je vous ai causés. J’y ai été poussée par les plus graves motifs. Même si vous n’approuvez pas les moyens que je mets en œuvre, j’espère remporter une grande victoire. Si j’échoue, l’Ordinn sera libre de frapper où elle le décidera et, en représailles de mes attaques, sa première cible sera certainement le Comté. Sa colère s’abattra sur les lieux où réside ma famille.

Je n’ai aucune chance de survivre à la destruction de l’Ord. Dès lors, mon fils aura plus que jamais besoin de vous pour se préparer à affronter le Malin une fois pour toutes. Quant à vous, restez fidèle à vos convictions. Mais je vous supplie de m’accorder deux exceptions. La première, bien sûr, concerne Tom. Votre autorité et votre direction lui seront plus que nécessaires dans la prochaine phase de sa vie. Il n’a jamais été en aussi grand danger.

La deuxième est à propos d’Alice Deane. Elle est la fille de Satan et d’une pernicieuse. Elle suivra toujours l’étroite ligne de crête qui sépare le bien du mal. Mais elle est forte. Incroyablement forte. Si elle consentait à une alliance avec l’obscur, elle deviendrait la sorcière la plus redoutable qui ait arpenté cette Terre. C’est cependant un risque qui vaut d’être couru, car elle peut tout aussi bien devenir une puissante servante de la lumière. Ce n’est qu’en travaillant ensemble que Tom et Alice atteindront le but que je me suis fixé, qu’ils achèveront l’œuvre de ma longue vie. Ensemble, ils ont la capacité de détruire le Malin et d’offrir au monde une nouvelle ère de paix.

Vous pouvez m’aider à rendre cet avenir possible. Je vous en prie, soyez du voyage ! Votre présence est indispensable pour assurer la protection de mon fils et son retour sain et sauf au Comté. En perdant un peu, vous gagnerez beaucoup.

Madame Ward

 

— Ta mère était une grande dame, déclara mon maître. Je continue de réprouver ses méthodes, mais je dois admettre qu’elle a achevé la tâche qu’elle s’était fixée. Grâce à elle, sa terre natale est redevenue un lieu habitable. Le Comté et le reste du monde seront également plus sûrs.

L’Épouvanteur rendait justice à maman, chose qu’il n’avait jamais faite pour Alice. Certes, il ne connaissait qu’une partie de la vérité. Jamais je ne lui dirais que ma mère était Lamia, la mère d’une longue lignée de sorcières et de créatures hybrides. C’était un des secrets que je devrais garder, conscient qu’il risquait de nous éloigner l’un de l’autre.

— Et Alice, demandai-je. Accèderez-vous à la requête de maman ?

Il fourragea dans sa barbe, la mine pensive. Puis il fit un signe d’acquiescement tout en déclarant d’un ton dur :

— Tu es toujours mon apprenti, petit. Maintenant que Bill Arkwright est mort, il est de mon devoir de poursuivre ton entraînement. Quant à la demande de ta mère concernant Alice, elle m’inquiète. J’aurai beau surveiller la fille de mon mieux, je sais qu’avec elle, tout peut aller de travers. Je me sens néanmoins enclin à lui accorder un essai, au moins pour les jours à venir. Je dois bien ça à ta mère.

 

Plus tard, je repensai à cette conversation. Tandis que nous parlions, j’avais presque réussi à me persuader que tout se terminerait bien, que l’Épouvanteur, Alice et moi retournerions tranquillement à Chipenden, que la vie reprendrait comme avant. Mais comment aurait-ce été possible, s’il ne me restait qu’un jour à passer sur cette Terre ?

Le sort qui m’attendait me terrifiait. Je fus sur le point de tout avouer à mon maître, espérant que, grâce à son vaste savoir, il trouverait un moyen de me sauver. Pourtant, il ne fallait pas y compter.

J’avais un ultime recours : utiliser la fiole de sang, comme Alice l’avait suggéré, en ajoutant quelques gouttes de mon sang au sien. Dans ce cas, nous serions condamnés à ne plus nous quitter jusqu’à la fin de nos jours pour qu’elle profite de cette protection contre le Malin. Si nous étions séparés, la fureur du Démon s’abattrait sur elle. Non, je n’avais pas le droit de courir ce risque. Je m’étais mis dans cette situation en connaissance de cause ; c’était à moi de m’en sortir ou d’en accepter les conséquences.

Epouvanteur 6 - Le sacrifice de l'épouvanteur
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